Un matin, Jean-Philippe m’a dit : « Si je devenais entrepreneur, tu serais d’accord ? ». Au chômage depuis quelques mois à peine, il venait de me faire une proposition de fou. Retrouver la sécurité d’un emploi salarié ou partir à l’aventure ? Depuis le licenciement de Jean Philippe, notre vie était devenue un grand tourbillon. Un foisonnement de questions. En quelques semaines, tous les repères avaient déjà volé en éclats. Pour moi, c’était déjà l’aventure.
Mais pour faire quoi ? « Je ne vais pas me lancer dans un truc que je ne connais pas. Je vais faire ce que je connais le mieux : vendre des meubles et de la déco. Des meubles fabriqués uniquement en Europe. Et naturels ».
Je n’ai pas mis longtemps à comprendre pourquoi il voulait faire cela. Dans Notre histoire, j’avais raconté cette histoire de canapés, arrivés dans des containers avec des produits chimiques en trop grande quantité. Tout cela l’avait marqué plus que prévu, et il ne le savait pas encore.
J’ai dit OUI immédiatement, sans réfléchir.
Je l’ai même conforté dans ce choix. Comme une évidence. Une conviction que sa décision serait la bonne. Sauf que, juste avant le licenciement de Jean-Philippe je venais de quitter volontairement mon travail, pour un projet professionnel. Avec la tournure que prenait notre situation, j’ai vite compris que mon projet ne verrait pas le jour. J’allais donc mettre toute mon énergie professionnelle pour travailler avec lui.
On allait se lancer dans un truc de fou, dont je ne connaissais quasi rien.
Si à l’époque je trouvais très classe qu’il me demande mon accord, aujourd’hui je dirai que cette demande est indispensable. Quand vous êtes en couple, il faut que la personne avec laquelle vous partagez votre vie soit partie-prenante de votre projet. Sinon comment allez-vous faire le jour où ?
Parce que dans l’aventure entrepreneuriale, il y a quelquefois des montagnes russes. On nous parle toujours du Top 50, ou des 10 entrepreneurs qui ont le mieux réussi. Ou l’inverse, de ceux qui ont tout perdu, ou qui galèrent. Mais au milieu, il y a cette majorité qui travaille, avance, sans grand bruit. Et on n’en parle pas. Ou si peu.
Lentement, mais sûrement.
N’allez pas imaginer que la réussite de votre entreprise sera pour le lendemain.
C’est un combat de tous les jours. Juste un combat de patience, de persévérance, de foi. Vous êtes passionné par votre projet ? Bien sûr, sinon vous n’en seriez pas là. Alors la meilleure recette est de mettre un pied devant l’autre, et d’avancer. Et d’y croire. Encore et encore. Si vous êtes convaincu que ce que vous faites est bien, alors ça le sera ! On dit que la foi déplace des montagnes, la passion le peut également. N’importe quel projet peut aboutir s’il est porté par la passion.
En couple, en famille ….. super, mais pas évident.
Jean-Philippe connaissait les grandes entreprises. Mon expérience se limitait aux petites.
Comment cohabiter quand vous n’avez aucun référentiel professionnel commun ? L’ajustement prend du temps. La vie familiale s’étend à la professionnelle. Où sont les frontières ? Au début, la famille en prend un coup. Tout est un peu (très) perturbé. Mais le jour où vos enfants vous disent qu’ils sont fiers de vous, toute votre fatigue, votre manque d’énergie, vos doutes, et j’en passe, tout est balayé d’un coup. Ceux qui réussissent ce tournant du premier coup, je leur tire le chapeau. Pour les autres, souvenez-vous de la toute petite phrase du début : « est-ce que tu serais d’accord ? ». Il faut se rappeler son engagement du début quand on est dans le brouillard. C’est une valeur sûre, celle à laquelle on peut se raccrocher. A 2 on va moins vite, mais on est plus fort !
« Le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui »
Un jour c’est le plein d’énergie. Le lendemain c’est le découragement. C’est long. C’est compliqué. C’est difficile. C’est normal. Où avez-vous vu que l’extase était permanente ? Si c’était le cas, elle n’aurait plus de saveur. Il faut de la passion pour arriver à son objectif. Celui qui voit petit, restera petit. Mais celui qui ose, prend le risque d’aboutir. Et chaque petite victoire est d’une telle intensité….
La passion, quel pouvoir !
Vous avez déjà imaginé que travailler sur un projet vous remplirait d’énergie ? J’ai vu celle de Jean-Philippe se décupler à la folie. Je lui ai fait confiance, parce que sa motivation était, et est toujours, sans limite.
On m’a demandé un jour si j’avais peur de perdre mon niveau de vie. Mais de quel niveau de vie parle-t-on ? Nous nous levons tous les matins pour notre objectif. C’est notre plus grande richesse !
8 ans après, je me dis que ce qui nous est arrivé de mieux, c’est justement d’avoir perdu un peu « le niveau ». Pour en trouver un bien meilleur.
Encore fallait-il se lancer. Nous l’avons fait. Et nous en sommes fiers et heureux.
La passion de notre engagement, c’est notre moteur. Et celui-là n’est pas polluant, on vous le promet. Il serait plutôt contagieux, non ?